Regards

Chronique du film Scrapper de Charlotte Regan

Par Chantal Laroche Poupard

Ce premier film de Charlotte Regan raconte dans un style concis et plein d’humour comment deux solitudes, vont essayer de s’apprivoiser.

La jeune Georgie, orpheline de mère, passe à travers les mailles du filet des services sociaux parfois débordés, de la banlieue de Londres.  Elle raconte qu’elle vit avec son oncle, mais en réalité, depuis la mort de sa mère, elle vit seule en volant avec son ami Ali,  des vélos qu’elle revend. Elle se « débrouille » d’où le titre « Scrapper » qui désigne entre autres une personne qui « se débrouille avec les moyens du bord ». Mais sous l’apparence d’une gamine débrouillarde, audacieuse et qui a réponse à tout,  se cachent les larmes de cette petite fille encore enfant qui, dans le recoin d’une ruelle, pleure sa mère en se raccrochant au seul souvenir que lui offre une vidéo de son portable.

 

Alors qu’elle discute chez elle avec Ali, un homme fait irruption dans sa maison. Il est jeune, s’appelle Jason et prétend être son père. Cet homme va en fait,  faire irruption dans sa vie. Georgie rejette d’emblée la présence invasive de ce personnage tout d’abord étrange,  ressemblant plus à un serial killer qu’à un père.

Mais voilà, Jason tente d’apprivoiser Georgie. Plus connu sous le nom de Harris Dickinson, le jeune influenceur du film Sans filtre de Ruben Öslund (Palme d’or 2022), Jason va tout faire pour adoucir sa relation avec Georgie. Dans une séquence superbe Georgie marche sur le trottoir de gauche tandis que Jason, sur celui de droite, essaie de la faire rire : entre chaque voiture stationnée, Jason apparaît sous différentes mimiques de personnages tout en faisant le clown. Il devient évidemment fort sympathique et peu à peu Jason et Georgie finissent par s’apprivoiser l’un et l’autre. Jason va lui révéler sa véritable histoire dans une séquence très pudique.

Pas de pathos dans ce film émouvant mais beaucoup de joie et même de l’humour, le tout porté par une musique parfois inquiétante qui devient joyeuse lorsqu’une superbe chorégraphie entraîne père et fille vers la réconciliation.

 

La réalisatrice se plaît à peindre les  couleurs chaudes des maisons qui contrastent avec la pauvreté du quartier. Ce premier long métrage de Charlotte Regan a quelque chose des films du grand Ken Loach tant il relate de problèmes sociaux.  Il a remporté le Prix du Jury du Festival de Sundance 2023, celui du Grand Prix du jury du Festival du film britannique de Dinard 2023. Il était en compétition officielle au Festival international de La Roche-sur-Yon 2023 dans la section Perspectives.

 

Production Grande-Bretagne, 2023, 1h24, avec Harris Dickinson, Lola Campbell, Alin Uzun.