Regards

L’Aveyron du Lot à l’Aubrac

Par Thierry Berthé

Si le sud du département de l’Aveyron est solidement attaché aux paysages des Grands Causses de Sauveterre et de Méjean comme au plateau du Lévezou, les contrées au nord de Rodez offrent une tout autre réalité au voyageur entre la haute vallée du Lot et l’immense plateau granitique aux restes volcaniques de l’Aubrac, paradis de l’estive heureusement traversé par les chemins de Saint Jacques de Compostelle. C’est donc vers cette belle et verdoyante contrée que je vous invite à me suivre.

Le vieux Rodez, érigé sur une butte dominant l’Aveyron de plus de cent mètres, a conservé beaucoup de sa splendeur passée entre maisons de maîtres et hôtels particuliers allant du 14ème au 18ème siècles. Le joyau de la cité ruthénienne reste toutefois la cathédrale Notre-Dame construite en grès rose de la fin du 13ème à l’aube du 16ème siècles. Elle allie une allure de forteresse à des parements Renaissance, une tour flamboyante et une décoration intérieure résolument Gothique. Les stalles du 15ème, le buffet d’orgue en bois sculpté, les gisants des évêques y attirent l’attention. Mais il est impossible de quitter Rodez sans évoquer Pierre Soulages, le peintre du Noir.

 

Au nord de la Ville, vers la vallée du Lot, le Causse Comtal est creusé par le Dourdou. On y découvre le village perché et les falaises dominant le “trou de Bozouls”, point de départ de randonnées attrayantes. Sans trop s’y attarder car la vallée du Lot nous attend. Haut lieu de la Via Podensis, ralliant le Puy en Velay à Saint Jacques, elle mène les promeneurs d’Espalion vers Conques, via le bourg fortifié d’Estaing. Le Lot y est dominé par le château construit dès le 11ème siècle – et largement transformé depuis – alors que le pittoresque dédale des rues en pente conduit à la belle église Saint-Fleuret (15ème siècle) point de passage des pèlerins pieux et laïcs mêlés.

 

A deux ou trois journées de marche, les mêmes pèlerins atteignent Conques, village accroché à la montagne, pour un repos légitime et un passage incontournable à l’Abbatiale Sainte-Foy. Rejoignons-les dans leur visite pour en partager la beauté et la grandeur. La majeure partie de l’édifice date du 12ème siècle et marque le pèlerin par la puissance émanant de la pierre dorée utilisée pour le bâtir et patinée par le temps. La décoration du tympan du portail représentant le jugement dernier impressionnait alors les croyants. Depuis, les vitraux proposés par Pierre Soulages, l’enfant du pays, offrent un contraste étonnant. Discrètement à l’écart, le “trésor de Conques” offre une magnifique collection de reliquaires allant du 9ème au 19ème siècles.

 

Au nord de la vallée du Lot qu’il domine de parfois 1 000 m, s’étend le plateau de l’Aubrac, sur 220 000 ha. Terre de tradition agropastorale, il est centré autour de Nasbinals, petite bourgade blottie autour de sa belle église romane (12ème – 14ème siècles). La transhumance y est vivace et les troupeaux des caractéristiques vaches “Aubrac” peuplent ce haut plateau de fin mai à octobre. Randonner sur le chemin jacquier qui le traverse ou le long de sentiers bordés de pierres sèches procure une grande sérénité. Le village d’Aubrac, ramassé autour de son église fortifiée permet de partager le célèbre aligot et d’embrasser un vaste paysage parsemé de lacs d’altitude. La rive nord du Lot abrite sur ses longues pentes nombre de hameaux authentiques, isolés et au nom fleuri qui regardent vers le sud : Bessuéjouls, Coubisou, Cabrespine ou les Mazes pour en citer quelques-uns.

 

Au cœur de la haute vallée du Lot, s’est implantée Espalion au croisement des voies fréquentées qui ont fait sa richesse d’alors. Autour du Pont-vieux (12ème siècle), la cité vit aujourd’hui du commerce et du tourisme, sous le regard du Vieux Palais du 16ème siècle, ancienne demeure du gouverneur. Les pèlerins marchant vers Compostelle y font une halte fraiche et ne manquent pas de rendre visite à la chapelle de Perse (11ème siècle) dédiée à Saint Hilarian, confesseur de Charlemagne.

A moins d’une lieue, à Saint-Côme d’Olt, de bon matin, il faut assister fin mai au passage des troupeaux en transhumance vers l’Aubrac qui parcourent jusqu’à 70 km avec pour seul ravitaillement une bonne lampée d’eau prise à la fontaine de grès rose du village, où le marcheur jacquier ne manque pas l’église au beau portail renaissance. Dominant Saint-Côme, le château médiéval de Roquelaure s’est endormi non loin des Clapas, étonnante coulée de lave concassée qui témoigne du passé volcanique de la région.

 

Si vous cherchez le calme, le dépaysement et l’air pur, vous êtes au bon endroit.

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