Baroque Abstrait
kyoto - Kokedera
Sous le titre de Baroque Abstrait, Cyb, que l’on connait comme peintre et qu’on a toujours su amoureuse d’écrire propose aux éditions Area un abécédaire qu’elle intitule Baroque Abstrait, ce qui tout à la fois peut paraître un oxymore autant qu’un pléonasme, mais il provoque une déflagration des sens, d’où jaillit alors des pensées sans mesure ailleurs. Elle se saisit dans le foisonnement de ses propos. Concevons que l’art soit cosa mentale et tout est dit : mentale, voilà sa part abstraite… Quant à la cosa, qui ne peut douter que la peinture, ici active présence de l’esprit et il nous parle.
Le texte du livre, par dizaine, offre ses entrées : charme de l’improbabilité quand se côtoient essaie en amorce – élaboration d’une pensée de l’art – et des flèches intimes, chargés de parfums venus d’ailleurs, dont la coruscante intensité nous mène aux lisières de l’enfance. Les lames du soleil ont gorgé dès l’origine la sensibilité de Cyb, elles ont produit les ferments d’une réflexion dont les étais : la musique, la littérature et la philosophie constituent des vertus cardinales, que son abécédaire livre par petites touches. Reste la peinture. La devinerait-on comme le produit de cela, ou bien serait-ce sa mécanique qui ordonnerait ce tout qu’elle est.
Sa peinture, sans concession n’est pas faite pour plaire, dès le premier regard, elle gène ou séduit parce qu’elle n’est que l’approbation totale de ce que l’artiste est au fond d’elle-même. Surgissement, Cyb ne peint pas le dos courbé par ce qu’elle sait ou la séduit, et sa culture n’a d’emprise ni sur son geste, ni sur sa palette qui n’affrète que des tons purs, par la magie des phosphènes. Jeux rythmés en accords des monochromes et stridences des tons posés en contrastes. Ces œuvres n’appellent pas à la dégustation plastique, mais stimulent le regard en laissant la vision libre. Ses couleurs posées avec une touche tout en busc, enchevêtrent les courbes, induisent des révolutions optiques. La couleur ici milite pour son propre espace et elle triomphe du tableau qui devient, notamment dans les dernières œuvres, source d’énergie. Épreuve par le regard de tout le corps noyé dans un ailleurs dont j’ignore le nom, mais qui me transporte dans des champs positifs. Les titres de Cyb accolés au tableau, évocation souvent voyageuse, ne sont qu’à elle nécessaires, et il ne gênent en rien l’étonnant transport que procure sa peinture.
Dans son exposition au Select, la magie des miroirs du lieu – qui depuis plus d’un siècle a accueilli les plus grands – multiplie encore les tournoiements de la couleur, et là, on crois comprendre ce que baroque suggère.
Theodore Blaise
CYB –Kyoto KOKEDERA
Jusqu’au 24 novembre 2018
Le Select American bar – 99 boulevard du Montparnasse
CYB – Baroque Abstrait – Edition Area-paris- www.areaparis.com