Jean Fréour De l’œuvre sculptée à l’expérimentation 3D (1)
Par Ghislaine Lejard
A l’étage du musée des Marais Salants de Batz-sur-Mer, 2 espaces pour faire revivre l’atelier du sculpteur et exposer des œuvres de l’artiste : des statuettes en plâtre, un bas-relief et la dernière pierre d’atelier inachevée Lilo.
Le 21 juillet 2019 le musée acquiert 17 statuettes en plâtre, des œuvres en bois, l’outillage de l’artiste, des cahiers photographiques, une documentation technique et 3000 négatifs.
La première salle reconstitue son atelier, sa recherche de matériaux, ses dessins préparatoires, son tablier de travail et sa ceinture de cuir accrochés au porte-manteau comme en attente de son retour…
Une salle didactique qui permet de saisir le très grand savoir-faire de cet artiste, on y découvre des explications sur la taille du bois, le dégrossissage, l’épannelage de la pierre, ainsi que la technique de la prise aux points et la technique des compas.
Jean Fréour s’inscrit dans la filiation de Auguste Rodin, il a été un disciple de Henri Bouchard à l’Ecole nationale des beaux- arts de Paris, il y acquiert les techniques « classiques » et s’inscrit dans le courant des sculpteurs académiques du XIXème siècle. En 1952, il réside à la Casa de Vélasquez à Madrid. Il sera le dernier survivant du mouvement Ar Seiz Breur.
Installé à Batz-sur-Mer en 1955, il en sera l’édile pendant un an et y résidera jusqu’à son décès le 11 juin 2010.
Il est le créateur en 1983 de la statue la Porteresse (2), une œuvre devenue l’emblème du musée des Marais Salants et de la ville de Batz-sur-Mer. L’affiche de l’exposition montre Jean Fréour avec sa sculpture et en arrière fond le paysage des marais salants.
Forte personnalité à l’esprit libre, il refusera la légion d’honneur, les reconnaissances de l’Académie des Arts. Il acceptera cependant en 1995 le collier de l’ordre de l’Hermine par l’Institut Culturel de Bretagne, cet ordre récompense des personnalités qui contribuent au rayonnement de la Bretagne.
Jean Fréour était fortement attaché à la Bretagne et à son identité catholique. Certaines de ses œuvres s’inscrivent dans ces deux sensibilités comme en témoigne la très belle statue « Bretagne mystique » exposée dans la première salle.
Une vie consacrée à son art : « Je suis entré en sculpture avec les mêmes renoncements, joie, ferveur, amour que ceux qui entrent dans les ordres. »
Il était bien un « ermite de l’art » comme l’appelait son ami le poète Yves Cosson.
Il œuvra pendant 70 ans, 756 œuvres ont été répertoriés, si on ajoute les plâtres et les bronzes on atteint le millier d’œuvres. 10% de ces œuvres sont dans des fonds publics comme la statue en bronze Anne de Bretagne qui orne le parvis du Château des Ducs de Bretagne à Nantes.
Sa collection personnelle était de 150 sculptures : « Celle dont je ne pourrai jamais me séparer est le nu, Le destin » (1977 en bois de padouk).
Il a eu de nombreuses commandes de l’Eglise et beaucoup de ses œuvres ornent les églises de Loire-Atlantique ou d’ailleurs comme certaines en Côte d’Ivoire…
Son épouse Soizic était sa muse, elle lui servira de modèle tant pour les œuvres « religieuses » que profanes. En cette exposition, une émouvante sculpture en bois d’iroko réalisée en 2007 le représente en tenue de sculpteur avec maillet et ciseau droit à la main en compagnie de sa femme. Des amitiés aussi l’inspirent notamment l’ami poète René Guy Cadou rencontré lorsqu’il vivait à Issé de 1947 à 1951, il réalisera un portrait en bronze et un buste du poète visible sur la façade de l’école de Louisfert où le poète enseigna.
Dans la deuxième salle, la dernière pierre inachevée Lilo a été numérisée et elle a été terminée virtuellement en 3D grâce à des photographies du modèle en plâtre et de Lilo achevée en bois de padouk. Le dispositif Kinect permet au public d’interagir avec la statue en 3D et de la faire bouger. « Une sculpture c’est une espèce d’architecture, un peu comme la musique une architecture dans l’espace. » Jean Fréour
Cette exposition est une immersion dans une œuvre essentielle du XXème siècle. Elle permet de découvrir un parcours humain et artistique hors norme consacré à la passion qui habitait cet artiste. Une exposition qui met en lumière un sculpteur pas assez reconnu, peut-être parce qu’il avait choisi d’être l’ermite entièrement voué à sa création, mais il est certain qu’il figurera en très bonne place dans l’histoire de la sculpture française.
Exposition Jean Fréour
Artiste Statuaire
De l’œuvre sculptée à l’expérimentation 3D
1er juillet 2023 – 12 mai 2024.
Musée des marais salants
Place Adèle Pichon 44740 Batz-sur-Mer
02 40 23 82 79
www.museedesmaraissalants.fr
Jean Fréour : 8 août 1919 Nantes – 11 juin 2010 Batz-sur-Mer
- Le projet a été retenu en 2023 dans le cadre du programme national de numérisation et de la valorisation des contenus culturels, lancé par le Ministère de la Culture
- Cette sculpture sera réalisée en bronze et en hommage aux femmes des salines, elle est installée devant le musée des Marais Salants