Poissons Volants
Par Elsa Kaminski
Comme son nom l’indique, l’exposition collective « Poissons volants », sous la direction de Sophie Bosselut et Sarah Cohen, fait des particularités de l’animal le pendant des oeuvres aujourd’hui présentées au 6b. En effet, la théorie du poisson volant selon laquelle l’animal s’extirpegracieusement hors de l’eau pour échapper à son prédateur convient donc admirablement à l’analyse poétique des artistes, c’est-à-dire aux situations où l’individu est placé devant un langage inhabituel, volontaire et libéré.
L’exposition vise ainsi à montrer leur volonté de s’affranchir des styles de règles pour s’abandonner à la matière et donner libre cours à la spontanéité et à la singularité.
C’est la réalité de cette dépossession traditionnelle et de la liberté du geste que les artistes de l’exposition font apparaître par la diversité de leurs oeuvres.
Le dessin est plus libre et les couleurs plus nombreuses. La vivacité des tons et des textures domine les idées et les multiples formes commandent l’espace.
Certains partent du visible et d’autres de l’invisible, ils explorent ensemble la nature, l’humain et l’imaginaire. Et c’est ici que la poétique se greffe sur les compositions où le vivant se construit et se déconstruit. Désormais les artistes s’attachent à proposer l’image d’une nature transformée par le temps et eux-mêmes plutôt que de représenter une réalité figée.
Ainsi l’aléa de la matière et des couleurs s’enracine dans l’oeuvre de Sophie Bosselut révélant une subtile disparité entre les lignes et les tâches qui avivent les surfaces et rehaussent la lumière.
Du contraste entre sa perception des organismes vivants et le support en bois, naissent les sculptures de Sarah Cohen dont la résine met en évidence leur caractère palpable.
Il s’en dégage ensuite, dans l’oeuvre de Jade Fenu, l’impression que les principes formels de la nature sont pénétrés par l’imprévisible où se dissolvent les contours habituels pour y laisser sa propre réalité.
Tandis que Cécile Henryon n’obtient la simplicité poétique et surréaliste de ses photographies que par la plus extrême justesse dans la disposition des objets et des lignes.
Aussi, ce qu’il faut admirer dans cette exposition, c’est leur vision personnelle qu’ils portent aux êtres et aux choses, à ces couleurs dont ils les baignent et les font s’interpénétrer pour nous offrir une atmosphère ni tout à fait réelle ni uniquement imaginaire.
Espace culturel « Le 6b » (Saint-Denis)
Du 14 juin au 27 juin 2019