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Stat Crux – François-Xavier de Boissoudy

Par Ghislaine Lejard

Au  Collège des Bernardins Paris et au Musée d’art sacré de Fourvière Lyon.

Ghislaine Lejard. Le titre de cette exposition  est emprunté à la devise des chartreux : «  Stat Crux dum volvitur orbis » « La croix demeure dressée tandis que le monde va sa course ». La croix demeure dressée parce que nous sommes toujours confrontés à la souffrance, au mal ;  cette croix  que représente-t-elle pour vous? 

François-Xavier de Boissoudy. Je me suis demandé ce que ça me faisait personnellement que le Christ soit mort sur une croix il y a deux mille ans,  afin que je trouve ma place dans cette histoire du Christ, qui ne cesse jamais d’avoir lieu. Ce Christ qui donne sa vie pour que je sois sauvé. Vous abordez le thème du mal qui justifierait la croix. En fait, ce qui m’étonne le plus, c’est que le Bien existe, qu’il soit quelqu’un qui se laisse rencontrer.  La croix est le lieu de Dieu qui transforme notre mal en pardon, en vie pour toujours.

Je crois que la croix du Christ est éternelle, dans le sens où nous faisons un petit tour sur terre, comme le dit cette devise de ce monde qui tourne, et nous le retrouverons sur cette croix, car il  nous attend. Que ferons- nous, chargés de nos péchés ? Allons-nous les lui remettre, en les avouant, en étant par terre, ou allons-nous les garder en nous, en creusant notre solitude ?

G.L. La croix est en votre exposition un signe lumineux, glorieux ;  vous avez le don de mettre en évidence la lumière, est-ce l’absence de peinture qui fait jaillir cette lumière au cœur de l’ombre, au cœur du noir ? expliquez -nous cette technique qui vous permet de la capter et de la transmettre

 

F-X de B. Dire la présence lumineuse en peinture, c’est peindre tout autour, avec de l’encre comme une boue colorée, à base de terre, en laissant une réserve, ce que je ne touche pas, chargée de dire ce que j’évoque seulement par son absence : la source lumineuse. Pour ce résultat, je me sers de l’eau versée et répandue sur le papier, à l’exception des zones qui situent l’illumination. Cette eau transporte les couleurs des encres, et les fait fuser. C’est une manière de laisser parler la matière, d’ évoquer la chair visitée par la lumière.

 

G.L. Vous dialoguez avec des écrivains contemporains tels que Sylvie Germain, Martin Steffens, et d’autres…Quelle est la place de l’écrit, de la lecture dans votre processus de création ?

 

F-X de B. Mon travail est d’abord de répondre aux intuitions d’images qui passent par moi, d’y être fidèle et d’en tirer une forme. Sylvie Germain, ou Martin Steffens sont des témoins, des amis, des chercheurs de Dieu  qui m’aident par leur regard à discerner, à me donner des pistes, des définitions, des renseignements acquis par leur travail de recherche. Je pense par exemple au merveilleux essai de Sylvie, intitulé Les échos du silence, qui cherche Dieu en ce monde, et qui le trouve en nos cœurs, et aussi au livre de Martin L’éternité reçue, qui parle de la vie d’amour au-delà de nos vies biologiques. Ils ont répondu à ma demande, et ont nommé  ce que je fais en peinture.

 

G.L. En introduction à vos œuvres exposées dans l’ancienne sacristie du collège des Bernardins, des photographies où l’on vous voit créer, elles sont accompagnées d’extraits des Evangiles. Avant de créer, priez-vous, méditez-vous ? ou est-ce l’acte même de la création qui devient prière, méditation ? votre peinture est-elle méditation incarnée ?

 

F-X de B. Disons que j’ai une vie de prière, mais je ne sais pas bien le statut de mon travail, je crois que c’est l’écho d’une rencontre en esprit avec celui qui est vivant. Peut-être qu’effectivement, l’acte de la création formelle lorsqu’il interroge l’invisible est un dialogue, une demande sans mots, une prière archaïque…

 

G.L. Etes-vous conscient que vos œuvres permettent de lire autrement  certains passages des Evangiles, est-ce ce que vous cherchez à faire ? Je pense notamment à votre œuvre Les compagnons d’Emmaüs. Jusqu’à la découverte de votre tableau, les compagnons étaient pour moi des hommes, aujourd’hui je peux y voir une présence féminine,  votre tableau nous rappelle que bien des femmes  suivaient Jésus.

 

F-X de B. Je crois que l’épisode des pèlerins d’Emmaüs nous parle du moment où nous marchons en la présence du Christ ressuscité. Etre en sa compagnie, ceci concerne chacun, et j’ai pensé à ma vie avec ma femme, et à notre engagement dans la présence du Christ le jour de notre mariage.

Je crois, comme les pèlerins, que je ne savais pas ce que cette résurrection signifiait de présence et de renouvellement dans ma vie personnelle, et que c’est en choisissant d’aimer, en premier lieu ma femme, que j’ai reçu mon identité ; vous savez, comme dans le Deutéronome, le chemin de la vie qu’on choisit… alors le reste, la vision, vient avec.

 

G.L. De très grandes toiles cohabitent avec des portraits, avez-vous souhaitez faire cheminer les visiteurs, de la croix dressée dans le paysage, dans l’espace, à un face à face intime avec le Christ, pour une montée vers Pâques ?

F-X de B : L’art est là pour accompagner les vivants, et j’espère proposer un art de la rencontre, c’est la meilleure chose qui soit arrivée dans ma vie.

 

 

Stat Crux  Collège des Bernardins

28 février – 6 avril 2024

20 tableaux lavis à l’encre sur papier

Ancienne sacristie, 20 rue de Poissy 75005 Paris

01 53 10 74 44        contact@collegedesbernardins.fr

La Galerie Guillaume qui expose régulièrement les œuvres de François –Xavier de Boissoudy est partenaire pour cette exposition.

Galerie Guillaume

32, rue de Penthièvre 75008 Paris

 

Stat Crux musée d’art sacré de Fourvière

20 avril – 29 septembre 2024

7-8 place de Fourvière Lyon

 

Un livre d’art Stat Crux

Œuvres de François-Xavier de Boissoudy, textes de Martin Steffens, Sylvie Germain, Robert Redeker, Olivier Kaeppelin, Didier Pourquery, Paule Amblard  éditions Collège des Bernardins