Lettres

Lisa Bresner, une jeune femme à la fulgurance lumineuse

Par Ghislaine Lejard

Un livre de Damien Robin paru en février 2024 qui relate le parcours hors norme de cette jeune femme très tôt disparue : Traits de lumière Lisa Bresner, une fulgurance Art3 Plessis éditions.

En ouverture du livre une citation de Lie Zi (2) traduite par Lisa Bresner qui de façon  prémonitoire et métaphorique, évoque la fin tragique de Lisa, tout comme le conte imaginé par Damien Robin et qui se termine par cette phrase : «  Sur le rocher où se trouvait Lucie quelques instants auparavant, se tient un oiseau en équilibre. » (p.143)

Lisa Bresner (1), un nom qui pour les nantais évoque une médiathèque dans le quartier de Bellevue. L’auteur a effectué un itinéraire littéraire et géographique à la recherche de cette figure lumineuse, douée, énigmatique, rayonnante et fulgurante, morte tragiquement à 35 ans, son œuvre est riche d’une trentaine d’ouvrages. Il construit son récit comme une enquête qui a pour fil conducteur La Loire qui traverse la ville de Nantes, la Loire et sa lumière, une lumière qui accompagne l’auteur comme elle a accompagné Lisa Bresner. Cette lumière éclaire sa quête et guideDamien Robin pour comprendre au mieux cette œuvre littéraire singulière : «  Ecrire implique de se confronter à la mort, de la même manière que la lumière exige le noir. Pas seulement l’ombre : le noir. Sans quoi cette lumière ne tient pas le coup. » (p.18)

Lisa Bresner était  précoce, elle avait commencé à écrire à 14 ans et publiera son premier roman à 21 ans : Le sculpteur de femmes Gallimard 1992 (3).  Elle sera en 1995-1996 pensionnaire à la Villa Médicis.

Après la publication de son premier roman, elle décide de quitter Paris et choisit de s’installer à Nantes, une ville près de l’Océan, une ville d’eau ; Comme Lisa, l’auteur aime à se promener le long du fleuve : « Refaire cette fameuse promenade au bord du fleuve à chaque fois qu’il est possible, en observant les modulations de la lumière. » (p.32)

Aller sur les traces  de Lisa Bresner, c’est  aller se promener du côté de Mesquer et Piriac, sur cette « côte sauvage » de l’Atlantique. C’est aussi se promener dans ses écrits et plonger dans ses centres d’intérêt, le japonais et le chinois qu’elle a commencé à apprendre dès 12 ans, elle sera plus tard proche du poète François Cheng qui lui dédicacera un poème, elle a une véritable passion pour la culture chinoise et le Siècle des Lumières ; elle échangera beaucoup avec le philosophe et écrivain Etiemble, elle admire les films du cinéaste japonais Kitano Takeshi , elle réalisera un court métrage en 2005 à Angers Mes autres, l’actrice Jeanne Moreau y joue une vieille femme qui veut se retrouver.

Elle est habitée par la mélancolie, comme celle qui habite l’œuvre de Marguerite Duras dont elle pourrait être l’un des personnages. Pour Damien Robin, Lisa Bresner pourrait être un personnage d’un des films de Jacques Rivette : « Lisa Bresner m’apparaît soudain comme une petite sœur des personnages féminins d’un film de Rivette au milieu des années 1990. »

Durant cet itinéraire mémoriel, Damien Robin a retrouvé une pépite, « une note d’intention » qui met en évidence  l’attachement qu’avait Lisa Bresner à l’image et à la mémoire.

Ecrivaine, cinéaste, calligraphe, elle est aussi dessinatrice : «  Quand je n’écris pas, je peins ; quand je ne peins pas, j’écris. » « La peinture s’isole de son paysage ou de son rêve pour se taire et écrire son silence. »

La question qui traverse tout le livre de Damien Robin à propos de Lisa Bresner et de son œuvre, est : « Quelle est cette lumière qui traverse tout, noir inclus ? »

Un livre essentiel pour ne pas oublier qui fut Lisa Bresner, un livre  qui remet dans la lumière  ces créations littéraires et artistiques, un livre qui la fait revivre car : «  Ses livres continuent, de manière souterraine d’infuser. Elle a tout son temps. Elle est là. » (p.123)

 

  • Lisa Bresner ( Paris 29 octobre 1971- Nantes 28 juillet 2007 )
  • « Je me concentrai, mon corps s’évanouit, chair et os se liquéfièrent, je flottais et évoluais dans un espace inconnu, comme une feuille ou une écorce sèche ballotée par le vent d’ouest ou d’est. Je ne savais plus si c’était le vent qui me conduisait ou si c’était moi qui chevauchais le vent. » Lie Zi traduction de Lisa Bresner
  • Quelques œuvres :

Le sculpteur de femmes Gallimard 1992

Ma tendre ennemie Gallimard 1994

Hong Kong souvenir Gallimard 1995

La vie chinoise de Marianne Gallimard 1996

Quatremers Le Céleste éditions MeMo 1996

Vingt – trois délices Gallimard 2000

Lao Tseu Actes Sud 2000

Pékin est mon jardin Actes Sud 2003